03 Mar 2023

Succession de l’entrepreneur : comment assurer la continuité d’exploitation de la société ?

De son vivant, le chef d’entreprise consacre son énergie au développement et à la pérennisation de ses activités, dans la perspective, peut-être, de transmettre un jour son entreprise.

Si la transmission des titres d’une société (par voie de cession, donation ou succession) est encadrée par la loi et les statuts, telle n’est pas le cas de la reprise de la direction de la société en cas de décès du chef d’entreprise.

Au-delà de la douleur causée par l’événement, cela pose une difficulté d’ordre économique et pratique : entre le décès du dirigeant et la convocation d’une Assemblée Générale destinée à se prononcer sur la nomination d’un nouveau mandataire social, l’entreprise sera dépourvue de représentant légal.

En pareil hypothèse, le risque pèse ainsi sur la continuité d’exploitation de la Société (relation avec les tiers, partenaires, salariés et administrations…). Il apparaît donc nécessaire de prévenir toute carence de dirigeant. A ce titre, trois mécanismes sont souvent évoqués.

Mandat de protection future ou mandat à effet posthume : Oui, mais…

Le mandat de protection future est une mesure de protection juridique, permettant au chef d’entreprise d’anticiper sa propre protection. Ce mécanisme permet notamment d’organiser la gestion des titres sociaux de la personne protégée. Pour autant, ce mandat ne permet pas d’organiser la gestion de la société. Le mandataire ainsi désigné pourra exercer les pouvoirs du défunt afférents à ses droits sociaux, mais il ne pourra exercer aucune fonction de direction en ses lieu et place.

Le mandat à effet posthume permet à l’entrepreneur de nommer un mandataire qui sera chargé, après son décès, d’administrer ou de gérer tout ou partie du patrimoine successoral pour le compte et dans l’intérêt d’un ou de plusieurs héritiers identifiés.

Dans le cas d’une entreprise exploitée sous forme individuelle, ce type de mandat pourrait s’avérer utile. Le mandataire aura alors pour mission de gérer l’entreprise. Mais si l’affaire du chef d’entreprise décédé est exploitée sous forme de société, la situation présenterait alors les mêmes limites que pour le mandat de protection future : dans la mesure où le mandat ne porte que sur le patrimoine du défunt, le mandataire ne serait alors amené qu’à exercer ses prérogatives d’associé de la société (droits de vote en Assemblée Générale), sans pouvoir prétendre à exercer la direction de cette dernière.

Une solution envisageable : la gérance supplétive.

Le mécanisme de gérance supplétive se traduit par l’insertion d’une clause dans les statuts de la société, permettant d’anticiper la question de la direction de cette dernière, en cas de décès ou d’incapacité du dirigeant en fonction. Il permet, en substance, de désigner par avance un dirigeant appelé à remplacer le chef d’entreprise en cas de survenance d’un tel évènement, afin d’assurer la gestion de la société sans discontinuité.

En cours de vie sociale, l’insertion dans les statuts de la société d’une telle clause incombe aux associés qui doivent y consentir, idéalement à l’unanimité. La personne appelée à prendre la direction de la société en cas d’incapacité (ou décès) du dirigeant en fonction, est alors identifiée nommément dans les statuts.

Cette décision étant formalisée par avance, et présente dans les statuts, permettra, en temps voulus, et sur la base de critères objectifs (certificat médical relatant l’incapacité, acte de décès…) de procéder aux formalités légales de remplacement du dirigeant empêché (publication d’une annonce légale et inscription du nouveau mandataire social au Registre du Commerce et des Sociétés).

Afin d’anticiper au mieux ce type de situation, il est intéressant pour un dirigeant unique de combiner les différents dispositifs. L’entrepreneur soucieux de préserver les intérêts de ses héritiers mais également ceux de l’entreprise, pourra envisager de faire établir, par acte notarié, un mandat de protection future et/ou un mandat posthume (effets sur le patrimoine), et de prévoir, à l’occasion d’une Assemblée générale réunissant ses associés, l’insertion d’une clause statutaire de gérance supplétive.

Retour

Sur le même sujet